Dr Olivia FROMIGUE (Institut Gustave Roussy)

La résistance aux traitements est un problème clinique majeur, en particulier dans le cas des ostéosarcomes, tumeurs osseuses touchant les enfants ou adolescents. En effet, la chimiothérapie, associée à la chirurgie, est le pivot central du traitement actuel. Or de nombreux ostéosarcomes sont ou deviennent résistants à ces médicaments antiprolifératifs. Les récidives et/ou l’apparition de métastases sont alors fréquentes. 2 patients sur 5 ne pourront être guéris ! L’ostéosarcome est donc un cancer pédiatrique à pronostic sombre pour lequel il est absolument nécessaire d’identifier les moyens de contrecarrer la résistance aux traitements afin d’améliorer les chances de guérison des patients.

L'équipe du Dr Olivia Fromigue a identifié la protéine MT2A dont la présence est indispensable aux cellules d’ostéosarcome pour survivre face aux chimiothérapies. L’analyse d’échantillons tumoraux prélevés avant le début de la chimiothérapie, a révélé que si les tumeurs expriment peu MT2A, les patients seront bons répondeurs au traitement alors que si le taux de MT2A est déjà élevé, les patients seront mauvais répondeurs avec un taux de survie réduit. Ainsi, leurs travaux suggèrent que MT2A serait un marqueur prédictif de résistance aux chimiothérapies utilisable dès le diagnostic.

La question suivante était d’envisager d’utiliser MT2A comme cible thérapeutique. Ils viennent d’apporter la preuve de concept que le blocage de l’expression de MT2A améliore significativement l’effet des chimiothérapies in vitro et chez l’animal. Avant d’envisager un développement clinique de cette découverte, il est nécessaire de bien caractériser les rôles de MT2A dans l’ensemble de la tumeur et pas seulement dans la cellule tumorale. Leur projet actuel , soutenu financièrement par Eva pour la vie (à travers une subvention de 21000 euros, versée début 2020), vise ainsi à étudier le rôle de MT2A dans la communication entre les cellules tumorales et les cellules de défense de l’organisme. En effet, l'équipe la soupçonne de participer à la tolérance des tumeurs par le système immunitaire...


Interview du Dr Olivia Fromigue (2020)

Pourquoi avez-vous décidé d'effectuer des travaux de recherche sur les cancers de l’enfant ?
Les recherches sur les cancers de l’enfant et l’adolescent sont indispensables, en parallèle des adultes car la biologie est très différente. Et certainement plus encore pour le tissu osseux en pleine croissance. Je l’avais déjà noté et étudié pendant ma thèse : le fonctionnement et l’activité d’une cellule osseuse formatrice sont différents chez le fœtus, l’enfant, l’adulte et la personne âgée. La réponse des cellules tumorales aux traitements définis pour l’adulte est elle aussi différente. Il est indispensable de mieux comprendre, de caractériser en détails les tumeurs de l’enfant pour proposer des solutions thérapeutiques parfaitement adaptées. Nos travaux visent à comprendre comment les cellules tumorales font face aux médicaments anticancéreux - chimiothérapie principalement - et pourquoi certaines tumeurs n’y sont pas sensibles et résistent au traitement.

Pourquoi vous intéressez-vous à l’ostéosarcome ?
Durant ma thèse, j’ai étudié le mécanisme de formation osseuse chez l’adulte et l’enfant. Puis je suis partie en post-doctorat au centre des tumeurs de l’Université Libre de Bruxelles, dans une équipe travaillant sur le cancer du sein métastatique et qui voulait monter un projet de recherche sur les interactions entre les cellules tumorales mammaires et les cellules osseuses. J’étais alors leur référente pour le tissu osseux normal et j’ai beaucoup appris sur les dérégulations et dysfonctionnement existants dans les cellules tumorales. Puis, j’ai réalisé un second post-doctorat à Nice sur le thème de la communication entre cellules tumorales et normales (dans le modèle de cancer du poumon) tout en me formant à une technique alors en plein essor : les puces à ADN. Il apparait clairement que les différentes cellules communiquent beaucoup. Les cellules normales reçoivent des signaux des cellules tumorales et vont adapter leur comportement pour malheureusement bien souvent « servir » et « profiter » au développement de la tumeur. De retour sur la région parisienne, j’ai orienté mes projets vers le cancer de l’os d’autant plus qu’à l’époque peu de recherche étaient menées sur ce cancer rare. J’ai ensuite eu la chance de rejoindre l’institut Gustave Roussy et d’interagir avec d’autres chercheurs et surtout des cliniciens sensibilisés aux tumeurs osseuses, et donc être au plus près de la réalité clinique.

Est-ce que ce projet pourrait aboutir à des avancées transversales, c'est à dire au delà de l'ostéosarcome, pour l'enfant ?
Oui, nos travaux sont réalisés dans le modèle de l’ostéosarcome mais la protéine MT2A peut être produite par n’importe quelle cellule normale de l’organisme qui doit faire face à une agression chimique ou toxique. Il est possible qu’il en soit de même pour les cellules tumorales. Le lien entre le niveau d’expression de MT2A par la tumeur et le pronostic est d’ailleurs décrit dans la littérature dans les cas de cancer du sein, de l’estomac, de la prostate... En revanche, aucune donnée n’était encore disponible quant au rôle de MT2A dans un cancer pédiatrique.

Pourquoi le financement d'Eva pour la vie, et des associations, est important pour vous ?
Alors que les financements par les grands programmes nationaux (voire internationaux) sont très rigides, le soutien ponctuel par les associations est décisif pour amorcer les projets de recherche, apporter les résultats préliminaires indispensables pour convaincre les grands financeurs. Cela permet aussi de réorienter rapidement les travaux vers les axes de recherche prometteurs.


Mise à jour de janvier 2022

Le soutien de l'association Eva pour la vie a permis d'accélérer fortement les recherches de l'équipe sur l'ostéosarcome. Ceux-ci concernent la tolérance par le système immunitaire des cellules tumorales pourtant anormales et dangereuses. Pourquoi et comment une tumeur peut-elle se développer sans être inquiétée ? Il existe malheureusement une multitude de possibilités ce qui rend les recherches en oncologie complexes mais tout aussi passionnantes. Les travaux de l'équipe se focalisent sur la communication entre les cellules au sein du microenvironnement tumoral et surtout comment les cellules tumorales piratent et parasitent les conversations des cellules immunitaires pour se protéger. Le projet soutenu par Eva pour la vie a permis de confirmer que les cellules tumorales vont brouiller les communications, afficher et envoyer des signaux dits immunosuppressifs c’est-à-dire faisant croire qu’elles sont « des amies ». Elles vont même jusqu’à encourager certaines cellules de l’immunité à travailler pour leur bien-être et leur croissance, une sorte d’enrôlement volontaire. L'équipe travaille actuellement à décortiquer ces signaux pour mieux infiltrer ces « fake news » et développer une stratégie thérapeutique afin d’améliorer les chances de guérison des patients atteints d'ostéosarcomes. 

NOUS SOUTENONS AUSSI..

Pr Marlène PASQUET (Service d'Hématologie-oncologie pédiatrique, Toulouse) & Justine Thomas

Eva pour la vie soutient le projet d'Activité Physique Adaptée chez l’enfant soigné pour un Cancer et Insulino-Sensibilité APACIS, porté par le Pr Marlène Pasquet, onco-hémato-immunologue pédiatre au sein de l'hôpital des enfants du CHU de Toulouse et Justine Thomas, enseignante en APA et doctorante, ainsi que le recrutement d'un poste d'APA au sein de ce service. 



VIRTU THERAPEUTICS (Nice)

Eva pour la vie & Grandir sans cancer ont, de par leur engagement financier, fortement accéléré le démarrage d’une start-up du médicament liée à la volonté de développer une petite molécule innovante pour le traitement du glioblastome, une tumeur du cerveau de l’adulte et de l’enfant très agressive et généralement incurable. Les dirigeants de cette start-up nous expliquent leurs travaux, perspectives et l'importance de favoriser le développement de petites sociétés axées sur des cancers rares, en particulier les cancers pédiatriques les plus agressifs ...

Dr Fabienne MEGGETTO (INSERM Toulouse)

Le Dr Fabienne Meggetto est directrice de recherche à l’INSERM de Toulouse, au sein d'une équipe d'excellence dont les travaux de recherche portent sur les lymphomes chez l’enfant. L'association Eva pour la vie a décidé d'apporter une aide de 50000 euros pour le démarrage d'un projet ambitieux et transversal, qui pourrait permettre de trouver de nouvelles voies thérapeutiques pour les lymphomes de mauvais pronostic, mais aussi, d'autres tumeurs solides tels que le neuroblastome....

Dr Celio POUPONNOT (Curie, Paris)

Eva pour la vie & Grandir Sans Cancer ont décidé de soutenir les travaux du Dr Célio POUPONNOT, à l'Institut Curie, en finançant le Projet « Modélisation du médulloblastome grâce à l’utilisation d’organoïdes humains cérébelleux et analyse de l’effet des polluants agricoles » à travers une subvention. Ce projet de recherche comporte une part de recherche environnementale crutiale, la question de la compréhension pour tenter de prévenir étant aussi importante que celle qui vise à mieux soigner les enfants atteints de cancers ...



Dr Sébastien APCHER (IGR, Villejuif)

Le Dr Sébastien APCHER est un chercheur INSERM responsable de l’équipe « Epitopes non-conventionnels et réponse immunitaire anti-cancéreuse » à l’INSTITUT GUSTAVE ROUSSY de Villejuif. Il a décidé d’orienter ses travaux de recherche sur les cancers de l’enfant. Eva pour la vie soutient financièrement cette équipe, d'une façon durable. Interview ...

Dr Max PIFFOUX (Centre Léon Bérard, Lyon)

Le Docteur Max PIFFOUX - sous la responsabilité de l’équipe "Apoptose et cancer" coordonnée par Aurélie DUTOUR au CLB - est le responsable scientifique du projet de recherche suivant : " De l'induction autophagique comme booster de la réponse aux immunothérapies : essai d'une nouvelle classe thérapeutique, les mimétiques de la restriction calorique, dans le modèle d'ostéosarcome pédiatrique". Eva pour la vie & Aidons Marina ont décidé de co-financer le lancement de ce projet, en apportant une subvention de 40000 euros.

Dr Patrick AUGUSTE (INSERM Bordeaux)

Depuis plus de 20 ans, cet enseignant chercheur travaille sur le cancer. Et cela fait presque 10 ans qu'il s'est dirigé dirigé vers le cancer du rein ou carcinome rénal. En rejoignant l'équipe du Dr Christophe Grosset (Inserm, équipe MiRCaDe), il voulait mettre à profit son expérience et franchir un nouveau pallier en travaillant sur les cancers de l'enfant. Il est à l'initiative d'un projet ambitieux, qui implique plusieurs chirurgiens, médecins et chercheurs internationaux, sur l'étude du néphroblastome (ou tumeur de Wilms) chez l'enfant, cofinancé par l'association Eva pour la vie et Aidons Marina ...



Dr Christophe GROSSET (INSERM Bordeaux)

Depuis 2012, le Dr Christophe Grosset étudie l’hépatoblastome, une tumeur du foie qui touche les très jeunes enfants. la principale difficulté est de traiter les patients souffrant de métastases ou d’une tumeur inopérable et résistante au traitement. Avec l'appui de l'association Eva pour la vie, l’équipe a mis en place un nouveau modèle d’hépatoblastome dans l’embryon de poulet qui permet de tester l’efficacité de nouvelles molécules thérapeutiques (comme les microARNs) et de faciliter l’étude de ces tumeurs en laboratoire. Son équipe s'investit également dans la recherche sur les tumeurs du tronc cérébral, avec des résultats prometteurs.

Dr Martin HAGEDORN (INSERM Bordeaux)

Depuis Septembre 2014, le Dr Martin Hagedorn pilote une équipe constituée de chercheurs (Caroline CAPDEVIELLE, Farah RAHAL, Justine CHARPENTIER et Mélissa MENARD) qui consacre ses travaux de recherche à l’identification de nouvelles cibles thérapeutiques dans les tumeurs du tronc cérébral et à l’amélioration de ses modes de traitement. Des travaux reconnus par plusieurs équipes & experts scientifiques européens. 



Dr Annie SCHMIDT (INSERM Nice)

L'équipe de recherche du Dr Alliana Schmid porte sur le traitement des métastases pulmonaires d'ostéosarcome, tumeur osseuse maligne la plus fréquente chez l’enfant et l’adolescent avec 150 nouveaux cas par an. Grâce au progrès de la chimiothérapie couplée à l’optimisation des techniques chirurgicales, le taux de survie atteint 60 à 70 % pour les patients présentant un ostéosarcome non métastatique. A l'inverse, la mortalité est très élevée pour les jeunes patients atteints d'ostéosarcomes métastatiques, d'où la nécessité absolue d'accélérer la recherche sur ces pathologies ...


Dr Eddy PASQUIER (CNRS Marseille)

Les travaux de recherche du Dr Pasquier se focalisent principalement sur le repositionnement de médicaments qui consiste à tester, dans de nouvelles indications thérapeutiques, des médicaments déjà approuvés par les autorités sanitaires. Le but de ce travail est d’identifier de nouvelles cibles thérapeutiques pour les cancers les plus difficiles à traiter et ainsi améliorer la prise en charge des patients atteints de ces formes agressives et réfractaires aux traitements. En particulier, les cancers pédiatriques (neuroblastome), les tumeurs cérébrales affectant les enfants comme les adultes (glioblastome, medulloblastome) ainsi que certaines formes rares de cancer (angiosarcome).



Dr Marie CASTETS (INSERM Lyon)

Les travaux de l'équipe INSERM co-dirigée par le Dr Marie Castets (CR1 Inserm, HDR) et le Dr Jean-Yves Blay (PUPH, HDR) portent sur la mort cellulaire et les cancers. Grâce au soutien d’Eva pour la Vie (55000 euros) et d’autres associations, cette équipe développe actuellement ces axes de recherche sur les rhabdomyosarcomes, les ostéosarcomes et les neuroblastomes ...



Pr Sébastien PAPOT (Université de Poitiers)

Fin 2018, la région Nouvelle Aquitaine a accepté de cofinancer avec Eva pour la vie le projet de recherche "Etudes biologiques et précliniques de nouveaux agents anticancéreux, dont certains ciblant EZH2/PRC2, dans le traitement de l’hépatoblastome hautement proliférant", mené par le Pr Papot et le Dr Grosset. L'association Eva pour la Vie a pris en charge à hauteur de 50% du coût l'achat d'un équipement de laboratoire (d'un montant de 9 000€) nécessaire au bon déroulement de ces travaux.

La recherche épidémiologique

Si le développement de voies thérapeutiques adaptées à l'enfant est indispensable (pour tenter de sauver les enfants qui aujourd'hui, demeurent sans solution thérapeutique et/ou pour réduire les effets secondaires), nous n'oublions pas une réalité tout aussi forte : sur les 50 dernières années, le nombre d'enfants touchés par un cancer n'a jamais baissé. Beaucoup reste à faire en matière de prévention, tant au niveau de la recherche que de la réglementation. Eva pour la vie intervient activement en co-financant des études environnementales. La première d'entre elle, HAPPI, visait à faire analyser par le laboratoire KUDZU SCIENCE des échantillons de poussière prélevés dans des habitations riveraines de vignes - accueillant des enfants ou des femmes enceintes - ainsi que dans une salle de classe d’école primaire.

André CICOLELLA (RES, Paris)

André Cicolella est un chimiste, toxicologue et chercheur français en santé environnementale, spécialiste de l’évaluation des risques sanitaires. Eva pour la vie a co-financé, avec le collectif REGARDS, la transposition française d'une étude menée au Danemark à partir des registres de cancer et de consommation des médicaments, qui avait mis en évidence un risque multiplié par 3 d'ostéosarcomes et par 2 de lymphomes hodgkiniens et non hodgkiniens en cas d'exposition via des médicaments utilisant le phtalate DEP (DiEthyl Phtalate) dans les médicaments gastro-résistants.